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Réunion - Les Fleurs du mal

Carnet de route sur l'île de La Réunion.
Enquête sur la question des plantes envahissantes.
Emission de la série "Jangal enquête" - France 5.
Juste avant le virus Chikungunya…

Ci dessous, le texte du film : commentaire + interviews.


Pitch

Le centre de l'île de la Réunion, département français, est constitué par une zone de forêt primaire en très bon état de conservation. Tous les scientifiques s'accordent pour dire qu'il s'agit d'un véritable bijou écologique, un site à valeur planétaire.
Mais ce formidable réservoir de biodiversité est menacé aujourd'hui par des plantes envahissantes. Difficilement repérables et surtout quantifiables, elles sont la deuxième cause de disparition de la biodiversité, à l'échelle mondiale.
La Réunion est classée parmi les dix îles possédant les espèces les plus menacées au monde. Mais sur l'île, en quelques décennies, près de la moitié des espèces d'oiseaux ont disparus, ainsi que les deux tiers des vertébrés terrestres. Des écosystèmes entiers ont été rayés de la carte de l'île. Il faut réagir.
Quinze ans après les premières études scientifiques, on a l'impression que rien n'a bougé.
Pourquoi ?
Comment ces plantes ont elles envahit l'île ?
Peut on s'en débarrasser et comment ?
A-t-on pris les bonnes décisions au bon moment ?
Va t on, à l'avenir, être capable d'enrayer l'invasion ?
Des laboratoires de recherche aux forêts primaires arrosées du coeur de l'île, Jangal mène l'enquête.




La Réunion. Département français.
750 000 habitants sur 2500 kilomètres carrés.
Un volcan au milieu de l'océan indien.
Au centre de l'île, une zone de forêt primaire en très bon état de conservation.

Tous les scientifiques s'accordent pour dire qu'il s'agit d'un véritable bijou écologique, un site à valeur planétaire.

Mais ce formidable réservoir de biodiversité est menacé aujourd'hui menacé par des plantes envahissantes. Difficilement repérables et surtout quantifiables, elles sont la deuxième cause de disparition de la biodiversité, à l'échelle mondiale.


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En 1989, le rapport Mac Donald tire la sonnette d'alarme sur cette question des pestes végétales.
Tout est dans ce rapport : la Réunion y est classée parmi les dix îles possédant les espèces les plus menacées au monde. Mais ici, en quelques décennies, près de la moitié des espèces d'oiseaux ont disparus, ainsi que les deux tiers des vertébrés terrestres. Des écosystèmes entiers ont été rayés de la carte de l'île. Il faut réagir.
Quinze ans après ce rapport, on a l'impression que rien n'a bougé.
Pourquoi ?

Comment ces plantes ont elles envahit l'île ?
Peut on s'en débarrasser et comment ?
Va t on à l'avenir être capable d'enrayer l'invasion ?
A-t-on pris les bonnes décisions au bon moment ?
D'abord, qu'est ce qu'une plante envahissante ?

Mission Atlas

En fait, tout commence en 1989, avec l'ingénieur Mac Donald, dont les recherches aboutissent à une liste des plantes à comportement envahissant. Comprendre pourquoi et comment elles se propagent relève d’une enquête difficile.
La première étape est l'inventaire des espèces présentes sur l'île.
À la Réunion, les premiers résultats de cet inventaire, en cours de réalisation, révèlent déjà une situation alarmante, bien que beaucoup de zones naturelles restent encore inexplorées sur l’île.

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Jean et Johnny parcourent l'île dans le but d’établir un atlas de la flore. Leur plus grand souci est la détermination des espèces.
Plus de 1600 espèces ont déjà été recensées mais il leur faudra au moins dix ans pour arriver à établir un répertoire exhaustif.
Leur recensement établit deux styles de plantes :
Les plantes exotiques, introduites par l'homme, dont un certain nombre d'espèces sont envahissantes…
Et les plantes indigènes, qui étaient là avant l'arrivée de l'homme. Parmi elles, des plantes endémiques, estimées à 200 espèces, dont le bois Tamarin, fougères géantes ou certaines orchidées qu'on ne trouve que sur l'île et qui sont parfois très mal connues des botanistes.

Jean HIVERT
"Andrecum Eburneum, ou grande comète. La plus grosse floraison d'orchidée indigène à la réunion, c'est à dire qu'elle est présente naturellement donc, Fleurit tardivement par rapport aux autres orchidées, notamment de cette zone, toutes sont déjà en fruits, Celle ci, elle a débuté sa floraison, peut être il y a un mois à peu près.
Ici, localement, elle va être très très abondante, on en trouve beaucoup, faudra même faire attention de pas marcher dessus, mais c'est un des très très rares endroits sur l'île où on est capables de les trouver justement.

On a un problème de manque de connaissance théorique, en terme de botanique, c'est à dire que notamment pour les orchidées, les graminées, les cypéracées, ben on s'appuie sur des flores notamment malgaches, parce que là y'a un travail quand même beaucoup plus important qui a été fait, et non pas sur des ouvrages spécifiques, finalement, à la flore réunionnaise".

Réduites à des peaux de chagrin par l'urbanisation croissante de l'île, les forêts de basse altitude sont attaquées de tous côtés par les plantes envahissantes.
Pour le Conservatoire Botanique de la Réunion, la sauvegarde des espèces indigènes commence par celle de ces forêts.


Vincent BOULET
"On a quand même, c'est des chiffes qu'on avance régulièrement, autour d'un tiers des espaces qui sont encore primaires ou en tous cas peu perturbés par les activités humaines.

Quand on dit, il reste à peu près un tiers, çà veut dire qu'on a deux tiers, et c'est énorme, qui sont d'emblée passés à d'autres vocations, essentiellement des vocations agricoles. Et en même temps des vocations urbaines, il suffit de regarder par exemple en très peu de temps, dans les années 50 toute la région du port était une immense savane, complètement nue, hein, et puis aujourd'hui il n'y a pratiquement plus, outre les installations portuaires évidemment, que des espaces commerciaux, et une très grande ville".

On pourrait croire que l'isolement protège les îles contre les invasions biologiques.
En fait, c'est au contraire cet isolement qui les a fragilisés, parce qu’elles n’ont pas acquis de défenses contre les prédateurs végétaux importés dans l’île. Toutes les îles du monde ont ce problème: la fragilité des habitats.


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Vincent BOULET

On a des habitats pour lesquels il manque des espèces. C'est à dire que dans une… Si on compare ces habitats à peu près similaires, homologues dans d'autres territoires, comme à Madagascar, et ben on s'aperçoit que ça représente 10 % de la saturation de la communauté. Par exemple.
Donc ça veut dire qu'il y a beaucoup de place pour les nouveaux arrivants. Et ces nouveaux arrivants, ben c'est à peu près ce qui est en train de se passer, voyant que les niches ne sont pas totalement occupées, et bien s'implantent, puis qu'il n'y a pas de concurrence en fait, hein, qui permettraient de les éliminer, d'où des impacts extrêmement forts.

Et là, y'a aucun frein. Donc si on est adapté, si on est capable d'avoir une dynamique extrêmement puissante et bien, on fait le ménage. Et donc quelques espèces peuvent faire le ménage très rapidement.
C'est le cas du goyavier, c'est le cas du longose de gartner, qui se sont retrouvées là une place extraordinaire pour leur développement et qui en l'espace, ben en gros de deux siècles, parfois un petit peu moins, ben ont occupé toutes les places qui étaient disponibles.


Jean HIVERT
Voilà quelques espèces ligneuses qui pourraient poser problème sur cette zone de forêt semi sèche, relativement conservée, c'est donc celui ci Lytsia Aglutinosa, avocat marron, l'origine je sais pas, mais il est exotique, et un comportement envahissant, donc lui il va poser problème, c'est sûr. Cet arbre ci également, donc, Eriobotria japonica, ou néflier du Japon, typiquement un arbre échappé de jardin, c'est à dire que les gens l'ont ramené à la réunion pour manger les nèfles, et puis on constate ici, il s'est vraiment, vraiment bien… il a trouvé sa place, et on voit qu'il est assez présent, et donc pareil, ça peut altérer sur la régénération des forêts indigènes, et des espèces indigènes, en fin de compte, tout simplement en prenant la place, en couvrant, en faisant de l'ombre.



Unité Mixte de Recherche

A l'époque du rapport Mac Donald, les biologistes de terrain avaient sous estimé les conséquences du phénomène des invasions. Aujourd'hui des zones entières de forêt risquent de disparaître à la Réunion.

A l'université de St Denis, Dominique STRASBERG, qui avait travaillé avec Mac Donald, gère une unité mixte de recherche sur la question des bio agresseurs en milieu tropical. Quinze ans ont passé depuis le début de ses recherches et le constat est sans appel : si on perd des écosystèmes entiers, il sera impossible de revenir en arrière et les plantes indigènes de l’île disparaîtront à tout jamais.


Dominique STRASBERG
Là, on n'a plus le droit à l'erreur, je pense qu'on a… pour plusieurs raisons.
c'est que le territoire est petit, et donc beaucoup de de processus sont irréversibles. On peut perdre, aujourd'hui on n'a pas le droit de perdre des espèces définitivement. On a des endémiques, si elles disparaissent, on sera les premiers responsables, et puis la France, à l'échelle nationale, aussi, sera responsable de la perte d'une espèce unique au monde, donc on a une certaine responsabilité.

La Réunion, c'est une région européenne, un département français, pays riche qui doit aussi être relativement exemplaire, conscient de son patrimoine. Ces espèces et ces milieux elles ne sont pas propriété, de nous, réunionnais, c'est un patrimoine international.



Conservatoire Botanique du Mascarin

Comment sauver ce patrimoine mondial ?
Direction le Conservatoire Botanique du Mascarin.
Ici, une équipe de chercheurs travaille à la sauvegarde de la flore endémique de l'océan
indien.

Elle observe en permanence les transformations des écosystèmes de l’île.

Aujourd'hui, Christophe LAVERGNE, rapporte d'une mission d'inventaire sur le terrain un tulipier du Gabon. Planté à l’origine au bord des routes, il a un comportement envahissant sur d'autres îles tropicales, dans le Pacifique, ainsi qu'à Mayotte. Une espèce à surveiller, qui fait partie d’un système de fiches alerte.

Différents moyens de lutte existent pour enrayer l'extinction des espèces à l'échelle de la
planète, mais il faut agir le plus vite possible.


Christophe LAVERGNE
Pour les invasions, c'est exactement comme des cancers. Plus on les dépiste tôt, plus on arrive à les éliminer. Cà coute moins cher aussi. Parce que finalement, une espèce, une fois qu'elle est établie, et qu'elle est sur de grandes surfaces, c'est illusoire de vouloir l'enlever, à moins d'utiliser des moyens de lutte biologique, mais c'est presque peine perdue.
Tandis qu'une espèce qui est à l'état de bombe à retardement dans un jardin, qui est pour l'instant en état de sommeil, et qu'on sait qu'elle est envahissante dans d'autres îles tropicales comparables, et ben, donc c'est là qu'il faudrait agir, là ça coute pas grand chose.
Ce qui coûte, c'est peut être…
La difficulté, c'est de l'identifier à temps, et puis d'agir rapidement.


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ONF Bébourg

Les conservateurs tirent la sonnette d'alarme, en pointant du doigt les gestionnaires des ressources naturelles, comme par exemple l'Office National des Forêts, qui gère le tiers de la surface de l'île.
En 500 ans, plus de 70 % des forêts ont déjà disparues.
A 1000 mètres d'altitude, dans le secteur le plus arrosé de l'île, s’étend sur plusieurs milliers d'hectares la forêt primaire de Bébourg. Ce véritable sanctuaire de biodiversité dans l'île est menacé de toutes parts par les plantes envahissantes, qui profitent de la moindre faille pour coloniser les espaces.

Julien TRIOLO
Là vous voyez ici que ce milieu est complètement presque exempt de peste.
C'est à dire il faut rappeler que ici on est dans une forêt de montagne, on a une structure très particulière. Vous voyez qu'on distingue très mal les différentes strates, les arbustes touchent les arbres, les herbacées vont toucher les arbustes, voyez que c'est un mélange très complexe. C'est vrai que là, finalement, y'a très peu de place pour les pestes végétales.

Dans les années 80, où la politique était à l'embellissement des routes, l'ONF avait lui-même repiqué l'hortensia, plante qui s'est révélée envahissante à La Réunion.

Des bords de route, l'hortensia a commencé à envahir les sous-bois. Étonnamment, elle s'accoutume à l'ombre, et peut donc envahir toute la forêt. Et elle adore les terrains volcaniques. Aujourd'hui, l'Office tente de réparer ses erreurs en pratiquant la coupe sélective.

JO
Ca faut l'enlever. C'est à partir de trucs comme çà, s'ils restent entières, ben c'est reparti quoi, donc faut… C'est un travail minutieux, petit et minutieux. Si on veut arriver à un résultat vraiment bien, c'est la seule façon de lutter avec l'hortensia.

On voit bien l'enracinement, c'est comme ca qu'il va partir, on voit la tige, on voit la touffe là, puis il repart, là y va faire ça, et continuer, et puis c'est parti, on voit les petits plants là, la preuve, et ça y faut… quand c'est comme çà on l'arrache, et voilà.


Julien TRIOLO
On l'a planté il y a 20 ans, j'allais dire aujourd'hui, on constate que c'est envahissant. Et ben il faut que ca soit suivi d'une action.
Donc j'allais dire aussi, en 20 ans, les connaissances ont beaucoup évolué. L'intérêt aussi pour les forêts, ont beaucoup évolué, on parle aujourd'hui beaucoup de biodiversité. Donc, nous ca se traduit en terme d'action, des actions de restauration du milieu pour qu'à long terme on puisse transmettre aux enfants des réunionais une forêt dans un bon état de conservation.


JO
Dès fois on est là, après de l'autre côté, deux ans on vient par là, ça pousse quand même derrière tu vois. Le contrôle il est pas fait, bon c'est normal, faut pas dire que… bon c'est quand même immense ici, on a pas assez de main d'oeuvre c'est tout.

Julien TRIOLO
C'est vrai que le problème, c'est qu'il faut que ça soit suivi.
Il faudrait vraiment que tout le monde aussi agisse de façon concertée, et que tout le monde aussi se sente concerné.


De l'autre côté des grillages, dans les terrains privés, l'hortensia menace la forêt.
Un peu plus bas, c'est le goyavier qui essaie de s'incruster et croître aux dépends de la forêt primaire de Bébourg, cernée de tous côtés.

Ennemi n°1 des espèces indigènes, le Goyavier Fraise est l'espèce la plus envahissante à l'échelle mondiale. A la Réunion, il a envahit presque tous les secteurs humides de l'île, en étouffant la végétation endémique.


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Visite du verger Goyavier

DELATRE
Alors on arrive, et on a justement une petite plaque avec le nom scientifique du Goyavier,  Goyavier : psidium cattleeianum.

Depuis qu'il a été introduit du Brésil en 1820, le Goyavier Fraise a eu le temps de se trouver des partisans comme ici à la Plaine des Palmistes.
Pour Monsieur DELATRE, le goyavier n'est pas une peste, au contraire, depuis 1999 il a même décidé d’en cultiver.

DELATRE
Alors là nous arrivons sur le verger, c'est une partie qui a été mise en culture, les goyaviers qui sont les plus grands là bas, où il y a les fruits, ont été tout simplement nettoyés, préparés, pour que les gens puissent les cueillir correctement.
on a décidé, pour  euh… de laisser quand même toutes les plantes endémiques de la Réunion. Vous avez une fougère arborescente qu'on a laissée. Une belle fougère arborescente, qui doit avoir plus d'une centaine d'années, certainement.

Voilà, là vous avez du goyavier.

Quand je suis dans le verger, je mange des goyaviers dans le verger.
Sinon pour la préparation pour mes petits enfants, c'est salade de goyavier avec du sucre, sur lesquels je vais mettre une petite pointe de chantilly, ils adorent çà.

Là c'est la partie un peu sauvage, c'est la partie qu'on a nettoyé, si on veut, où on a coupé les arbustes, on les a taillé, et ils ont repoussé. D'ailleurs, là, vous voyez là, ils ont été coupé là. Il ont été coupés à ce niveau là. Et tous ces bourgeons là, c'est des rejets.
A chaque fois qu'on coupe un arbuste, il sort une vingtaine de rejets. Alors il faut en enlever dix neuf, et en garder un.

Je dis que c'est pas une peste végétale, je dirai plutôt que c'est une plante envahissante. Parce que le goyavier permet à certaines familles de vivre.
Et du goyavier, on va faire de la gelée de goyavier, on va faire de la compote de goyavier, on va faire de la pâte de goyavier, on va faire du sirop de goyavier, on va faire du vinaigre de goyavier, on va faire du vin de goyavier, on va faire du sirop de goyavier, et on va faire des glaces, des mousses, quantité de préparation. On fait même, avec les viandes, le porc ou le canard, y'a le fameux canard aux goyaviers de la Plaine des Palmistes, le porc au goyavier. On fait des clafoutis, on fait beaucoup de choses.
Donc ce n'est pas une peste végétale. Si on arrive à la domestiquer, comme moi je l'ai fait, et ben on a un verger, qui permet aux gens de se satisfaire le dimanche, et les jours de semaine aussi.


Julien TRIOLO
Une peste végétale, n'est une peste végétale que parce qu'elle envahit les milieux naturels. Parce que vous prenez l'exemple du goyavier.
Le goyavier, ça peut être considéré comme une aubaine. Parce que son fruit est délicieux, il donne du bois qui est très résistant, donc sur beaucoup d'aspects, finalement, c'est plutôt une aubaine, économique et sociale.
Pour la forêt c'est une catastrophe.
Parce que les scientifiques nous disent : c'est la plante la plus envahissante.

Christophe LAVERGNE
C'est une espèce typique, un cas particulier, qui génére des conflits d'intérêts. Puisque l'homme s'y est intéressé, et finalement voit que le côté bénéfique des choses. Mais je pense que la population, y'en a très peu qui ont vraiment conscience que c'est une plante qui aussi abime beaucoup les milieux. Qui fait beaucoup de dégâts sur les milieux naturels, ceux qui nous restent.
Donc les gens voient plutôt le côté bénéfique, ce qui touche à l'estomac finalement.


DELATRE
S'il fallait détruire les plantes envahissantes, le goyavier serait placé en dernier, je dis. Et encore, est ce qu'il faut le détruire ? Moi je suis contre, hein, moi si faut voter on détruit le goyavier, je vote contre, ça y'a pas de problème.

Je pense que l'onf doit faire en sorte que ce goyavier là n'envahisse pas, n'empêche pas les plantes indigènes, les plantes endémiques de pousser.

On est à une dizaine de mètres du rempart, à une dizaine de mètres du rempart, bon ben là, y'a toujours du goyavier.
C'est vrai que l'onf ne va pas monter dans le rempart pour enlever les plants de goyavier.


Christophe LAVERGNE
Maintenant, de toute façon cette espèce est bien installée à la Réunion.
Elle est pratiquement partout, elle a fait déjà énormément de dégâts.
Mais certains petites euh… recommandations, ou peut être… euh, disons cahier des… tenues de bonne conduite, seraient préconisées, par exemple, les gens qui cultivent le goyavier, si on met en place des champs de goyavier, faudrait éviter de les mettre en place à côté de forêts naturelles par exemple.


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Séquence ONF St Joseph

Le combat contre l'envahissement du goyavier semble perdu d'avance.
Aujourd'hui, l'Office National des Forêts est contraint à faire de la lutte mécanique, pour tenter de sauver ce qui peut l'être.

Ici, à St Joseph, sur 16 hectares de parcelles plantées par l'onf, entourées là aussi de terrains privés, les goyaviers sont coupés au sabre 2 à 3 fois par an.

Patrick PEGOUD
Agent patrimonial St Joseph
On a quelques arbres qui étaient sortis avant le goyavier, qui étaient restés, donc on a un bois maigre, quelques maos, donc le goyavier n'ira pas concurrencer ces espèces. Mais en revanche, lorsqu'on écarte, donc, on a un fourré quasiment pur de goyavier. On a plus que du goyavier. Et dans ce fourré, très peu d'essences vont pouvoir tirer leur épingle du jeu, et pouvoir sortir la tête.


Le contrôle du goyavier semble aujourd'hui impossible.
Alors on tente de nouveaux outils.

Mais le sabre est bien, pour le moment, la seule méthode satisfaisante pour Julien Triolo


Julien TRIOLO
Là, le but du jeu pour le goyavier, c'est bien d'arriver à le contrôler, parce que sinon les goyaviers vont faire mourir tout ce qu'on a pu planté et là dans un deuxième temps c'est aussi préserver toutes les espèces indigènes qui sont revenues sur cette parcelle. Donc sinon on aurait à terme une forêt de production, en sous étage, que du goyavier. Donc on aurait un désert biologique dans notre plantation. Nous c'est pas du tout le but recherché, et on veut profiter, ben que toutes ces espèces là, qui reviennent dans la parcelle, on fasse en sorte de les favoriser.  

Là, vous avez un tan Georges, là vous avez un bois d'osto, c'est les noms, local, qu'on donne ici. Vous avez ici un bois de savon.
Voilà une liane typique de la forêt de montagne.

Le but du jeu c'est un peu de récréer l'effet d'un prédateur, parce que le goyavier n'a plus du tout de prédateur ici.
Le but du jeu un petit peu, c'est de revenir régulièrement, comme un herbivore pourrait manger cette plante.


La lutte mécanique contre le goyavier a ses limites. Une fois qu’un certain équilibre naturel a été créé avec les plantes envahissantes, on ne sait pas ce que va engendrer leur destruction.

Patrick PEGOUD
Ce qui peut être dangereux, c'est que… à enlever en fait une espèce envahissante, on peut être amené à lutter tout de suite derrière contre une nouvelle essence, donc une pionnière, qui va coloniser tout de suite le milieu, plus rapidement en tous cas que les essences indigènes ou endémiques, et on va être obligés de relutter l'année d'après sur une nouvelle essence envahissante.
C'est ce qui s'est passé dans déjà deux placettes qu'on a repéré, où on a une graminée qui a remplacé le goyavier, donc on a plus de goyavier, mais on a cette graminée, qui devient aussi envahissante, et qui posera peut être encore plus de problèmes que le goyavier pour les semis.


Julien TRIOLO
Là tu avais un fourré, on avait un fourré à goyavier, et là on voit, ben finalement y'a plus aucune indigène qui a survécu. Hein, c'est à dire qu'y a plus aucune indigène qui peut  arriver à pousser là dessus.
Donc finalement, l'arracher complètement pour arriver à s'en débarrasser une fois pour toute, d'après les premières conclusions de cette étude qui est en cours, elles tendent plutôt à montrer que c'est pas forcément la solution la plus radicale.


Ramassage verger

Retour à la Plaine des palmistes.
Pendant que l'ONF sabre le goyavier, qui s'est propagé sur les terrains domaniaux, Mr DELATRE, lui, ouvre son verger. La saison de récolte commence.
Les premiers clients - un comité d'entreprise...- sont bien décidés à remplir leurs seaux.

Contenant 20 fois plus de vitamine C que l'orange, le goyavier est devenu une ressource économique et une espèce de plus en plus recherchée.

DELATRE
Y'a une cascade…

Première femme
Là vous voyez, j'ai presque un seau là bientôt ! Je vais m'arrêter alors que vous en avez des tonnes et des tonnes quoi.
- Il paraît que c'est une peste végétale, vous en pensez quoi ?
- Oui, je suis d'accord, parce que vous avez vu, toutes les autres plantes, après dessous, elles sont complètement bouffées quoi. Les autres plantes, elles arrivent plus à s'épanouir comme il faudrait.

Deuxième femme
Même si c'est une peste végétale, ça a toujours fait partie des paysages réunionnais, et un bon créole ne laisserait pas la saison passer si elle ne goute pas à ce petit fruit rouge. Et c'est bourré de vitamines, ça hein ! c'est mieux que l'orange encore. Donc même si c'est une peste végétale, mais on adore notre petit fruit rouge.

Première femme
On empêche qu'il se développe trop quand même, je suppose… je suppose ! Oui c'est une peste végétale, oui parce que les autres plantes après n'arrivent plus à pousser.

Vincent BOULET
Il est vrai que pour les gens qui habitent ici, beaucoup de ces espèces invasives sont des plantes utiles, sont des plantes qui socialement, culturellement, ont un lien très très fort avec la Réunion, et avec les réunionnais.
Donc quand ce lien en plus est doublé d'intérêts économiques, et bien là on est finalement devant un dilemme, qui n'a pas forcément de solution évidente.
Eradiquer le goyavier, c'est impossible.


Fête du Goyavier

17 éme fête des goyaviers.
Inauguration en grande pompes, par tous les notables locaux.
Si la recherche scientifique et les protecteurs des milieux alertent l'opinion publique sur les dangers de cette plante envahissante, leur discours vient buter sur une autre vision des choses.

Le fruit s'est aujourd'hui incrusté non seulement dans les forêts, mais aussi dans la vie des réunionnais.

Le maire de la commune vient de signer la semaine dernière un partenariat avec une entreprise japonaise, qui veut importer des fruits transformés.
La filière goyavier va devoir s'organiser pour répondre aux nouvelles demandes.

Jean Marc MARIANNE
Je suis très très proche de l'environnement. Ceci dit, c'est une peste végétale d'un point de vue scientifique. Mais en ce qui nous concerne, la réunion, ou en tous cas le centre de l'île, et à la plaine des Palmistes il y a toujours eu des goyaviers, et si on avait des pestes comme çà, qui pouvaient protéger nos sols, qui pouvaient structurer notre aménagement du territoire, et qui en plus pouvaient être quelque chose d'économique, je crois que tout le monde en serait ravi.


Vincent BOULET
On parle plutôt des pestes qui intéressent personne, cà cà marche mieux. C'est plus facile par exemple de parler du longose de Gartner qui n'a plus aucune fonction, qui n'intéresse personne. Le raisin marron, c'est une espèce désagréable, épineuse, elle nous empêche de passer, de circuler, ça on peut l'éliminer, on sent bien que quelque part la notion de peste est bien percue par l'ensemble de la population. Dire que le goyavier est une peste ffff, ben, on peut pas entendre ça, parce qu'au contraire, c'est une amie de l'homme, c'est une plante utile, c'est une plante qui est délicieuse, etc on peut pas parler de peste hein.

Peut être aussi qu'il faut que le temps passe, et que les sociétés s'accomodent du fait que les espèces envahissantes créent plus de nuisance finalement que de bien, et donc même celles auxquelles on était attachés, ben peut être il faut se mettre progressivement l'idée qu'on ferait bien de s'en détacher et d'essayer de les éliminer. Mais ca peut pas être brutal, çà peut pas venir d'un seul coup. Et puis il faut aussi que la lutte contre les espèces invasives fasse ses preuves. Avant de lancer des grandes guerres contre une espèce invasive, il faut être certain qu'on maîtrise bien les techniques d'éradication, et que ça soit quelque chose qui soit couronné de succès.


Cirad Laboratoire


Puisqu'il est impossible de se débarrasser du goyavier, les efforts se sont portés sur une autre plante, en apparence plus facile à éradiquer : la vigne marronne.
Nom scientifique : "Rubus".
Elle n'est pas productive, et menace les terres agricoles.

Direction le Cirad de la Réunion, centre de recherche agronomique, équipé d'un laboratoire de quarantaine, qui permet d'étudier virus, bactéries, insectes, en toute sécurité.

Comment se débarrasser d'une plante envahissante comme Rubus ? On l'a vu avec le goyavier, la lutte mécanique a ses limites. Ici, la lutte biologique semble être une autre solution, plus efficace.
L'idée est d'introduire un insecte ravageur, qui détruit la plante. Dix ans d'études ont été investis dans ce programme expérimental de lutte biologique.
Mais avant de lâcher l'insecte dans la nature, la méthode doit encore faire ses preuves.

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Thomas LE BOURGEOIS

Là on arrive dans la partie laboratoire…

Donc, dans tout ce bâtiment consacré à l'entomologie et à la malherbologie, on a un laboratoire ici, sur tout ce qui est mauvaises herbes, plantes envahissantes, avec notamment actuellement quelques cages de rubus, sur lesquelles on élève un petit charançon, alcidodes, qui est originaire de Chine, qui est un charançon qui se déplace très très peu, qui vole très peu aussi, mais qui est conservé en cage, dans ce laboratoire, pour étudier son cycle de développement.

Donc là on a affaire à un charançon dont les adultes vont ronger et creuser des gouttières dans l'écorce, notamment dans les parties jeunes, dans les extrémités de tige, le long des pétioles, hein… ici. Euh, le long des pédoncules floraux, qui va fragiliser ces tiges ou ces pétioles, ce qui fait qu'en cas de coup de vent les tiges vont se casser, les pétioles vont se casser, les feuilles vont tomber.
Vous voyez le long de la tige les dégâts occasionnés sur l'écorce. L'écorce devient complètement pelucheuse. On voit qu'elle est complètement rongée jusqu'au bois. Mais ça a un impact considérable considérable quand même sur le potentiel de croissance de la plante.


Jean HIVERT
Là on joue aux apprenti sorciers, hein ! on ramène une bête qui n'est pas présente naturellement à la Réunion pour manger ça. qu'est ce qui va nous dire que, ben, la bête va réellement rester à manger cette plante, et qu'elle va pas non plus s'échapper et manger autre chose, quoi, des choses qu'il faut préserver justement, quoi ?


Christophe LAVERGNE
C'est bien d'essayer de chercher à mettre au point des moyens de lutte biologique. maintenant c'est très complexe. Et effectivement une lutte biologique, ça se met au point au bout de plus de dix ans. Il faut dix ans de recherche.


LE BOURGEOIS
Il nous faut faire des études de spécificité. Vérifier si ces insectes ne s'attaquent qu'au Rubus Alcéifolus, l'espèce envahissante à la Réunion, ou s'ils peuvent s'attaquer aussi à d'autres espèces, que ce soient des espèces cultivées, d'intérêt économique, que ce soient des espèces indigènes, voire endémiques de la Réunion, donc d'intérêt patrimonial.
 

Jean HIVERT
Les gens qui travaillent là dessus, notamment Thomas Le BOURGEOIS, sont en plein dans un pôle de recherche sur les systèmes naturels, hein, mais voilà, c'est une manne financière, ils ont obtenu des crédits assez importants pour travailler là dessus, y vont pas cracher dessus, quoi hein, c'est aussi les aléas de la recherche et de son financement, c'est pas forcément ce qui est le mieux pour l'environnement ou quoi, mais c'est ce qui est porteur en ce moment, la lutte biologique, ça fait énormément parler, la Réunion veut y participer à son tour, et ben ils ont choisi ce modèle là de Rubus, pourquoi pas, c'est peut être une très bonne question de recherche, mais en tous cas moi je pense pas que ce soit la plante prioritaire sur laquelle il faille lutter de cette façon, de façon biologique, sur l'île, quoi.


Dominique STRASBERG
Si on lâche quelque chose, il faut un suivi, cela demande des moyens considérables. Savoir ce que va devenir un insecte venu de Chine ou d'ailleurs. Et donc est ce que les décideurs vont être prêts.
S'ils autorisent un lâcher d'insecte, il faut signer derrière 20 ans de suivi.
Aujourd'hui, je suis pas sûr qu'on soit prêt à financer ça.


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Cirad Mare Longue

Chaque fois qu'on supprime un élément d’un écosystème c'est tout son équilibre qui est perturbé. L’étude de la dynamique forestière permet de mieux comprendre aujourd’hui comment les plantes envahissantes occupent l'espace disponible.

Alors qu'on ne sait pas encore si on peut valider la lutte biologique contre Rubus, il faut en même temps surveiller de nouvelles espèces, qui pénètrent et s'installent dans les forêts.


LE BOURGEOIS
On voit bien la pénétration du Clidemia le long des chemins, et là il pénêtre en forêt. puisque là on est dans la zone de réserve biologique donc, de forêt naturelle. On est dans une zone de plantation, et également, dès que l'on a une trouée, là, une belle masse de Rubus, avec des tiges qui commençent à monter, puis qui vont poursuivre leur croissance, et grimper dans les arbres.

Dans des secteurs entiers, la forêt est aussi totalement envahie par des jamroses, une espèce exotique envahissante arrivée du sous continent indien.
De l'autre côté de la route, l'ONF expérimente la lutte chimique pour préserver, là aussi, les plantations.


LE BOURGEOIS
C'est une plantation qui a cinq ans, donc des arbres qui sont déjà bien développés. Mais qu'il faut continuer à protéger, puisqu'ils n'ont pas encore couvert complétement le milieu. Donc l'Onf est obligé de passer régulièrement pour nettoyer le sous bois, et utilise ici des herbicides des herbicides de contact, qui vont tuer les plantes herbacées.
Mais vous voyez que immédiatement, y'a de nouvelles germinations du Clidémia, et puis un certain nombre d'espèces qui ne sont pas ou peu atteintes par les herbicides.
Donc tout çà va se redévelopper assez rapidement, ce qui oblige l'onf à intervenir très très régulièrement.

Les herbicides ne sont pas la solution miracle.

En enlevant une espèce, on permet à une autre de prendre le dessus.


LE BOURGEOIS
Là on a ici une petite cariofilacée, qui s'étale sur le sol.
Elle s'appelle Drimia Cordata, qui a résisté relativement bien aux herbicides utilisés pour nettoyer la plantation. Et qui va envahir en faisant un matelas, un matelas complètement uniforme.
Donc encore un cas d'une espèce qui était initialement essentiellement dans les cultures, et puis qui, du fait de la dissémination par les gens, par les animaux, par les véhicules, gagne les bords de route, et puis tout doucement tout doucement, s'installe au bénéfice de l'ouverture des milieux, et puis arrive à résister aux herbicides qui peuvent être utilisés.


Christophe LAVERGNE
On est loin de comprendre tout ce qui se passe dans un écosystème.
Quand l'homme intervient, en fait il provoque des perturbations. Et en fait les éléments de l'écosystème réagissent tous différemment.
On sait pas encore comment çà fonctionne. Le fonctionnement, la dynamique, les proccesus écologiques. Y'a tout à faire.
C'est un champ énorme d'investigation.
Comment la forêt se régénère, chaque type d'habitat se régénére ? Comment par exemple des insectes interagissent avec la flore pour les polleniser.
Toutes ces interactions sont encore mal connues, et donc là aussi y'a un champ d'étude énorme.


Il faut du temps pour centraliser les données.
On commence tout juste à réunir les informations, et rassembler les connaissances sur les écosystèmes.
Alors qu'on croyait avoir bien défini les problèmes, il reste encore des pans entiers de recherche à développer avant de maîtriser les processus  d'envahissement.


Dominique STRASBERG
Y'a un tel travail sur les questions environnementales à la Réunion, tout le monde est relativement débordé.
Ici, même une simple carte qui fait état de la faune, très détaillée, on est en train de la construire. On l'a pas !
C'est quelque chose qu'on a euh… on en a dix huits modèles en métropole, on peut même les suivre depuis 100 ans, et voir si des espèces, sur ce qui a été fait récemment, si des espèces diminuent.
Le défi il est là. Pour nous.
Répondre dans… travailler dans l'urgence, sur des enjeux à mon avis très forts, internationaux, sans avoir de recul qui existe sur des pays européens habituels.


Bryophytes

Dominique Strasberg a invité Jacques BARDAT pour aider une de ses étudiantes qui travaille sur  la formation de la  forêt de Mare Longue.
Ici, il y a 600 ans, c'était une coulée de lave. Depuis, une forêt a poussé. Premières espèces à s'installer, les mousses et de minuscules végétaux parasites, les bryophytes.
Jacques et Claudine répertorient ces bryophytes, et découvrent toutes les semaines de nouvelles espèces.

L'idée originale est ici d'étudier comment se reconstruit la forêt, et de comprendre comment se forme un écosystème. Au lieu de travailler sur une espèce en particulier, on étudie l’interaction entre les espèces.


AH PENG
Ce qui est intéressant, là, c'est qu'on a des sporophytes, donc qui contiennent les spores, et c'est plus facile pour l'identification en fait.

Ici, les bryophytes sont plutôt sur les troncs, sur les racines, elles sont collées au substrat
Alors que dans les forêts d'altitude, elles forment des manchons, remplis d'eau, elles retiennent, elles ont ce rôle en fait de retenir l'humidité, et de stocker les éléments nutritifs. Donc elles ont un rôle important, elles jouent un rôle important dans les écosystèmes.

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En étudiant ces bryophytes, les botanistes vont comprendre comment s'opère le processus de recolonisation des espaces, et établir ainsi des modèles de dynamique forestière.


Jacques BARDAT
J'me fais pas trop d'illusion, hein.
Là où la vigne marrone a pris une ampleur extraordinaire, et bien on va avoir des sous bois extrêmement sombres, pratiquement sans végétation en dessous, et là ça risque d'être extrêmement pauvre sur le plan des mousses, ça c'est clair.

Les modifications de la dynamique forestière sont ici le résultat très concret d’une diminution de lumière qu’entraîne l’envahissement par la vigne marronne.
Pour Dominique Strasberg la plus grande prudence s’impose en ce qui concerne l’import de plante ou d’animaux.

Dominique STRASBERG
Si on prend un peu de recul, aussi, la Réunion, beaucoup de plantes introduites, certes, mais pas encore de cas d'invasions aussi fortes que dans d'autres îles, donc c'est… il faut empêcher à tout prix l'arrivée massive d'animaux très dangereux, ou d'autres plantes très envahissantes qu'on a pas encore.
Là dessus on serait impardonnable si on se ratait… Là à mon avis…
Mon inquiétude elle est là…


Douanes

Est il possible d'empêcher les plantes envahissantes de rentrer sur l'île ?
Pas si simple…
Le port de la Réunion reçoit 80 000 tonnes de marchandises importées chaque année.

Ici, le service des douanes effectue un contrôle phytosanitaire sur un bateau en provenance de Madagascar.

Ils l’effectuent à partir d’une liste réglementaire d’éléments interdits sur l’île. Malheureusement cette liste de référence concerne seulement les micro-organismes nuisibles et pas les végétaux.
Pour légiférer sur les pestes végétales, il faut prouver que ces végétaux sont nuisibles.
C’est-à-dire constater les dégâts.
Mais il est souvent trop tard pour lutter contre, une fois qu'elles sont implantées.

Julien TRIOLO
Il est très facile d'introduire des graines quand on vient à la Réunion, il suffit d'en mettre dans sa poche, c'est très difficile de pouvoir contrôler toutes les personnes qui rentrent sur le territoire réunionnais. Donc des graines dans une poche, j'allais dire, ou dans un petit sachet dans sa valise, y'a de très fortes chances que ça passe. Donc là encore, la sensibilisation de tous les gens qui viennent à la Réunion est capitale. C'est à dire qu'il faudrait vraiment qu'ils prennent conscience de l'importance que peut avoir la petite graine qui est dans leur poche. C'est à dire que cette graine, plus tard, ça peut être le nouveau goyavier.

JEUFFRAULT
Cà, c'est complètement interdit. Présence en fait de tâches suspectes, qui peuvent être à l'origine d'un organisme nuisible de type champignon, une bactérie.
Cà, on prélève là.


JEUFFRAULT
Les corps d'inspection sont présents, ben, sur les grosses entrées. Les grosses entrées, c'est l'aéroport, le port, mais ils sont beaucoup moins présents, voire pas du tout présent  sur par exemple les marinas, parce que là c'est beaucoup plus difficile à mettre en place, au niveau des contrôles. On est moins présent par exemple sur les messageries express par exemple, ou les postes. J'ai tendance à dire le contrôle phytosanitaire, c'est un grand filet, un premier filtre avec un grand filet, et en fait l'efficacité du contrôle dépend de la maille. Le problème, c'est que on voit bien, la maille on peut pas la resserer. A un moment ou à un autre tout ce qui rentre et qui n'est pas déclaré n'est pas contrôlé, c'est ça le risque.


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Aéroport de St Denis.
Arrivée d'un avion en provenance de Dzaoudzi, Mayotte.
Au contrôle des passagers, les douaniers effectuent une fouille sélective.


JEUFFRAULT
A la Réunion, on a démarré un travail un peu exceptionnel, qui est effectivement de revoir cette norme qui existe, c'est une norme internationale, ce qu'on appelle l'analyse de risque phytosanitaire. Et là, nous, on est en train de l'adapter aux pestes végétales, compte tenu des nombreuses introductions qu'on a eu sur ces cinquante dernières années.
Donc ce qu'on souhaiterait dans un premier temps, c'est de travailler avec un groupe d'experts, un groupe de réflexion, pour arriver assez rapidement à lister déjà une vingtaine d'espèces végétales majeures, que l'on pourrait donc inscrire sur cette liste, et qui devraient faire l'objet d'une interdiction totale, et d'une information, d'une communication derrière, pour que tout le monde soit conscient de ne pas introduire ces pestes végétales.

JEUFFRAULT
Il existe donc au niveau international des modèles de contrôle, sur lesquels d'ailleurs à la Réunion on essaye de s'appuyer. C'est les modèles australiens, c'est les modèles néo zélandais, où là vous avez toute une série de filtres qui n'existent pas encore au niveau français, et qui sont relativement efficaces, je veux parler par exemple des rayons X, tout est passé aux rayons X à l'entrée, on a des chiens renifleurs, qui sont élevés pour faire du contrôle végétal, mais bon tout ceci a un coût, tout ceci a un moyen, et puis derrière il faut qu'il y ait une décision qui soit prise. Au jour d'aujourd'hui, on en est pas encore là à la Réunion, même si on le souhaiterait.


En 2004, la Région Réunion a dépensé plus de 500 000 euros pour la lutte contre les pestes végétales, pourtant elle n'arrive même pas à contrôler l'arrivée de nouvelles espèces.
Certains voient dans le projet de Parc National des Hauts le seul moyen de protéger ce qui reste d'espèces endémiques. Mais mettre la nature sous cloche est-ce la bonne solution ?
Coincés entre deux tendances, la conservation et le développement, les politiques voudraient que l'île devienne une sorte de laboratoire de développement durable.
Mais cela reste pour beaucoup de beaux discours.

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Christophe LAVERGNE
Est ce qu'on continue comme çà, est ce qu'on développe une stratégie, puisqu'il n'y en a jamais eu, et puis est ce qu'on l'applique ? C'est assez complexe, parce que ça fait interagir à la fois ben les gestionnaires, les financeurs, il faut les persuader, il faut persuader les élus, que il y a des enjeux importants, la sensibilisation, l'éducation c'est aussi un énorme travail à faire, et à la Réunion on est encore assez en retard à ce niveau.


Dominique STRASBERG
Il faudrait dès maintenant réfléchir à ce que va devenir la réunion dans 20 ans.
Et ne pas attendre que le parc se crée en se disant le parc va tout régler, ça c'est impossible.


LE BOURGEOIS
On conserve pas pour le plaisir de conserver. Ou pour dire ah ben oui, mais peut être qu'un jour telle plante aura telle utilité. Conserver des milieux naturels, ça a une valeur sociale, ça a une valeur économique, ça a une valeur patrimoniale, ça a une valeur au niveau du pool génétique mondial, bon, ça a tout un tas de valeurs, donc toutes ces valeurs, faut les mettre aussi dans la balance.


Vincent BOULET
Y'a évidemment une envie, de nombreux acteurs ont envie, justement d'être capable de mettre en place cette stratégie active coordonnée, mais on est quand même en 2005, et elle n'existe pas cette stratégie, alors que les phénomènes sont criants quoi. C'est un petit peu ça. Peut être que demain, et tout le monde le souhaite, c'est déjà un petit peu tard. Y'a urgence à mettre en place cette stratégie. Et à faire en sorte que les différents acteurs soient capables d'associer leurs moyens, leurs méthodes, leurs réflexions, pour vraiment être efficaces.

Ce manque de coordination entre les acteurs de l’île est une perte de temps.
Il faudra bien pourtant trouver cet équilibre entre la conservation des espaces naturels et un développement économique raisonné.
L'appauvrissement des espaces naturels de la Réunion risque à terme de toucher l'économie de l'île, basée sur le tourisme.


Christophe LAVERGNE
Quelle route on veut faire prendre à la Réunion ?
Est ce qu'on veut en faire un parc national, avec euh, attirer des gens, faire voir en fait la Réunion, son originalité, c'est les milieux naturels, sa nature, ou est ce que… sans empêcher bien sûr le développement économique de l'île. Donc tout le problème est là, et il va falloir faire des concessions quoi…
Les aménageurs, les hommes politiques ont vraiment une lourde responsabilité sur leurs épaules.

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BERNE
On est en face de problèmes d'érosion de la biodiversité. On prend de plein fouet. Je crois que la ceinture intertropicale va prendre de plein fouet les changements climatiques, mais en face de cela, on a des problèmes humains, et bon, il faut choisir.
On a un taux de chômage qui est le plus élevé de la métropole, on a une démographie, qui malgré la baisse du taux de fécondité, continue à augmenter, on est 760 000 habitants, on atteindra le million, donc tout ça ça demande à construire des logements, en 2020, il faudra entre 2005 et 2025, il faudra construire à peu près 150 000 logements, bon faudra faire des lycées, des écoles, et tout ça, donc c'est vrai qu'on est en face d'une politique où il faut anticiper beaucoup.


Anticiper est le maître mot. Il a fallu quinze ans pour mettre en place des structures de sauvegarde, pas encore toutes efficaces. Et dix ans pour tester les formes de lutte, et s'apercevoir de leurs limites.
La biodiversité de la Réunion sera la première à disparaître si des actions rapides ne sont pas lancées.

Dominique STRASBERG
Au delà de la biodiversité, il faut regarder la planète. C'est 10 milliards d'habitants, des ressources qui s'épuisent, les pays pauvres qui sont en pleine première ligne. Perdre une forêt tropicale, c'est… maintenant on arrive à évaluer l'aspect irréversible, baisse de fertilité des sols, plus d'eau, des épidémies… les premières populations à en souffrir, c'est pas nous, c'est pas nous les pays riches hein ! Le processus franco français de se réunir, il faudrait dépasser un petit peu ça. Se sentir peut être plus, sans vouloir changer le monde du jour au lendemain, mais avoir une conscience de citoyen planétaire, de terrien, et dire bon…
L'enjeu, à mon avis, il est planétaire.


Fin du film.



Actualité
Le Parc National du Piton de la Fournaise a finalement été créé, par décret du 5 mars 2007.


Pour en savoir plus, ou suivre l'actualité :

ONF
http://www.onf.fr/pres/orga/9025.htm
Conservatoire Botanique du Mascarin
http://sciencesecole.ac-reunion.fr/html/botanique/conserv_botanique.html
Cirad
http://www.cirad.fr/reunion
Conseil Général
http://www.cg974.fr/
Région
http://www.regionreunion.com/
Mission Parc National
http://www.parc-national-reunion.prd.fr/index2.html


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